Michel DEZA Chercheur en Mathematiques et Informatique, Directeur de Recherche au CNRS LIENS, DMI, Ecole Normale Superieure, Paris COMMUNIQUE du 5 juillet 1998 LA MALADIE DU MONDE SCIENTIFIQUE: INAMOVIBILITE DE LA HIERARCHIE, PASSE-DROITS, OPACITE ET PARALYSIE INSTITUTIONNELLE Priere d'envoyer toute reponse ou correspondance a l'adresse: Michel DEZA, 17 passage de l'Industrie, 75010 PARIS Telephone et Fax: 0147703673 "Je suis malade et je me sens mourir, et je n'en sais rien sauf ce que j'entends dire. Je voudrais un medecin a mon gout, et je n'en trouve aucun. Il sera bon medecin s'il parvient a me guerir, non si j'empire" Guillaume de Poitiers (l'original est en langue d'Oc). Malgre des Services de la Communication tres etoffes et influents, dont la pression permanente sur les medias joue un role de censure evident, la hierarchie des etablissements scientifiques et periscientifiques n'a pas pu eviter l'emergence, ces derniers temps, de plusieurs reportages et informations la mettant severement en cause. La "fuite des cerveaux" et les dysfonctionnements divers (Association pour la Recherche sur le Cancer, dont le Conseil d'Administration a toujours ete majoritairement forme de membres eminents de la hierarchie scientifique; sang contamine; Centre Lacassagne de Nice, dont le Laboratoire du Cyclotron joue un role essentiel dans le projet d' "amplificateur d'energie"; fiasco de LOCSTAR dans le spatial; debacle d'ACRI dans l'informatique; rapports defavorables; situations conflictuelles liees a une contestation profonde des decisions prises...) ont pris une ampleur sans precedent et inquietent tres serieusement l'opinion publique. Pourtant, depuis deux decennies, les institutions scientifiques sont assaillies en permanence par des "reformes", "reflexions en vue de reformes" et "projets de reforme" aboutissant a de nombreux decrets, arretes, decisions, circulaires, "debats", "consultations"... dont, a en juger par les resultats, l'effet semble etre d'empirer progressivement la situation. Quel est donc le probleme reel des etablissements scientifiques et periscientifiques, que les "reformes" aggravent alors qu'elles devraient y porter remede et en identifier les causes? Certaines situations sont meme hallucinantes. Depuis son entree dans la fonction publique, le CNRS ne procedait pas a la publication statutaire des nominations de ses fonctionnaires: seules les nominations de "chefs" avaient droit au Bulletin Officiel de l'Etablissement. Cette politique, impossible a expliquer car violant manifestement le statut des fonctionnaires, rendait toutes les embauches et changements de corps susceptibles d'attaque au au contentieux a tout moment (alors que les dossiers de candidature ont souvent ete detruits!!). Saisi de recours gracieux et contentieux contre ce dysfonctionnement, le CNRS semblait etre empeche, par quelque chose de tres profond, de remettre en question sa politique et de regulariser par la publication les nominations de ses fonctionnaires intervenues depuis 1986. Il etait question, a la place, de mettre a contribution des parlementaires pour tenter d'obtenir des lois de validation (une fois de plus, le passe-droit a la place du droit...). Ce n'est que tres recemment, sous la pression d'annulations de concours et nominations par le Conseil d'Etat accompagnees d'interventions de parlementaires alertes par les chercheurs, que la Direction du CNRS semble avoir finalement entrepris de corriger cette carence (le B.O. de juin 1998 regularise les nominations intervenues depuis 1995)... Que s'etait-il passe dans les coulisses? Qu'en disaient - ou auraient du en dire - les controleurs financiers? Qui etait responsable de ce fonctionnement aberrant devenu chronique, et quelles en etaient les raisons? Depuis vingt ans, le monde scientifique francais a ete secoue par l'arrivee au pouvoir d'une nomenklatura de directeurs, managers, administrateurs, coordinateurs... Le pouvoir, privileges et passe-droits de cette constellation s'accroissent sans cesse alors que l'autonomie statutaire est, dans la pratique, refusee aux chercheurs. De plus en plus, ces responsables et administrateurs forment une vraie caste occupant a vie des fonctions de la meme nature et passant d'un etablissement a un autre (e.g. de president d'une instance nationale d'evaluation a directeur general d'un etablissement public, ensuite president d'un autre etablissement, ensuite president de l'etablissement precedent, puis haut commisaire d'une autre institution prestigieuse...). Une telle evolution contraste brutalement avec la periode precedente (annees 60-70 , que j'ai eu le privilege de connaitre en tant que chercheur du CNRS depuis 1973) ou l'exercice des taches de direction etait une corvee ne procurant aucun avantage ni promotion, acceptee pour une duree limitee comme un service rendu a la communaute pour retourner ensuite aux activites de recherche, a l'epoque la seule source reelle de promotion. En meme temps, la These d'Etat (barrage republicain qui preservait le merite et empechait tres souvent le copinage et les pratiques d'influence) a ete supprimee rendant possibles des nominations sur des criteres etrangers a la valeur professionnelle des nommes. Les criteres dits "relationnels" ont, depuis cette date, pris l'ascendant sur l'appreciation objective de la valeur des candidats aux nominations ou aux financements. Les chercheurs se sont trouves de plus en plus exposes a des discriminations, mises au placard, purges politiques et mainmises qui leur enlevent au benefice de tiers leurs acquis professionnels et creations originales. Confrontee a des recours administratifs et contentieux, et a un nombre croissant de situations conflictuelles, la Direction du CNRS a durci sa position et choisi, a la place de la negociation, le renforcement de son administration et de son "service juridique". Les chercheurs victimes d'abus de pouvoir sont accules a un combat inegal, vu les effectifs et la qualification de ce service dont un ancien rapporteur de la Commission d'Acces aux Documents Administratifs a pris la direction en 1994 et dont le responsable sortant, fin 1992, est devenu Commisaire du Gouvernement au Tribunal Administratif de Paris, puis rapporteur a la Section du Contentieux du Conseil d'Etat. Parallelement, la hierarchie a multiplie les mesures coercitives: par exemple, les menaces de licenciement et de coupure de salaire ont souvent ete brandies contre les personnels du Laboratoire de Physique Corpusculaire du College de France dont plusieurs chercheurs subissent (depuis 6 ans pour l'un d'entre eux!) des exclusions et mises au placard, avec privation de moyens financiers et d'outils de travail jusqu'au blocage de moyens recus de l'exterieur dans le cadre de contrats (meme europeens). Les consequences auraient ete devastatrices si la plupart des chercheurs seniors n'etaient proteges par un statut de fonctionnaires (pour un avant-gout de ce que "donnerait" un statut "du prive", voir entre autres l' "affaire Francois Schachter" dans la revue britannique "Nature" de fevrier 1998, vol. 391, p. 727 ou contacter Francois.Schachter@devinci.fr). Or, depuis deux decennies, toutes les "reformes" des institutions scientifiques sont menees a terme ou inspirees par cette meme "classe hierarchique" qui, de plus en plus, en profite et s'installe pour defendre des privileges acquis.... Malheureusement, le suivisme de certains medias les conduit a ne repercuter devant le public que les "debats" qui ont lieu au sein de la hierarchie. La voix des chercheurs est ainsi systematiquement etouffee, alors qu'aucun des "medecins" cooptes ne semble etre en mesure de "guerir la maladie"! La voie de la "guerison" ne residerait-elle pas, en fin de compte, dans la remise en question du pouvoir, privileges et passe-droits de la hierarchie et dans le respect de l'autonomie statutaire des chercheurs? Si tel est le cas, il m'apparait que l' "affaire DEZA" illustre une incapacite des institutions pour envisager une telle voie de leur propre chef et sans contrainte exterieure... Je joins a la fin du present document la version .txt d'une note recemment diffusee a des parlementaires et qui evoque brievement les origines de l' "affaire DEZA". Contrainte de retirer une mutation d'office dont le caractere de sanction deguisee etait manifeste, la direction du CNRS ne parvient pas a clore le dossier a cause de la pression des hierarches mis en cause par le retrait de la decision (e.g. menace de demission de l'actuel directeur du LIENS qui a suspendu unilateralement l'exercice des ses fonctions pour exiger mon depart). Pour satisfaire aux exigences des appareils, la Direction du CNRS vient de me placer dans une situation d'apartheid politique au sein du Departement de Mathematiques et d'Informatique de l'Ecole Normale, avec un budget personnalise affecte directement a la Delegation Regionale Paris B du CNRS. Je suis ainsi exclu des activites preparant l'avenir du laboratoire, au moment ou le statut de celui-ci doit faire l'objet d'un nouveau contrat. Ce n'est pas un comportement nouveau: meme lorsque l'institution est reconnue fautive et condamnee en justice (a deux reprises dans mon cas), aucune poursuite disciplinaire ni en responsabilite n'est engagee contre la hierarchie ou l'administration alors que la victime de l'abus de pouvoir reste dans le collimateur et se trouve catalogue comme un element antisocial qui "ne peut s'ntendre avec personne" et qu'il convient d'isoler. L'administre est donc "perdant meme lorsqu'il gagne". Les eventuels "mediateurs" auront le devoir sacre de confirmer, en tout etat de cause, le caractere "destabilisateur" du "comportement" de la victime des abus et la "necessite", pour la "communaute", de perpetuer son isolement. Ce systeme totalitaire, qui viole grossierement les Droits de l'Homme les plus elementaires et qui genere une dynamique manifestement contraire au developpement economique, survit et se developpe au coeur meme des institutions d'un Etat qui se veut depositaire des valeurs les plus avancees. Personne ne semble etre en mesure d'enrayer cette evolution. EN ANNEXE: NOTE ADRESSE AUX PARLEMENTAIRES EN AVRIL 1998 12 avril 1998 Michel DEZA 17 passage de l'Industrie, 75010 PARIS; Telephone et Fax: 0147703673 Mathematicien, Directeur de Recherche au CNRS (LIENS, Ecole Normale Superieure) Les vrais problemes de fond derriere l' "affaire DEZA" ou la necessite d'une commission d'enquete parlementaire sur la recherche. Pour manifester ma disconformite envers une mutation d'office, revetant manifestement le caractere d'une sanction et dont le but etait de m'expulser de l'Ecole Normale Superieure (ENS, ou je suis affecte) pour des raisons que l'administration avoue etre etrangeres a ma valeur professionnelle, j'ai ete contraint de faire une greve de la faim pendant seize jours. 1. Pourquoi une greve de la faim dans un etablissement scientifique? Theoriquement, les chercheurs scientifiques jouissent de droits reconnus par un statut de fonctionnaires. Les administrations de la recherche se presentent devant l'opinion publique comme des entites progressistes, d'idees avancees et ouvertes au dialogue. Mais la realite est toute autre: c'est seulement apres une longue greve de la faim de ma part, et a cause de l'emoi que cette action a produit a l'exterieur des institutions scientifiques comme parmi mes collegues, que l'administration (CNRS et ENS) a accepte l'ouverture d'un dialogue. Le CNRS venait d'etre condamne par les Tribunaux administratifs pour des abus de pouvoir dont j'avais ete victime, mais ces condamnations avaient eu pour effet d'accroitre l'agressivite de l'administration a mon egard (mobilisant sa "Direction des Ressources Humaines"). Le simple fait d'avoir exerce le droit d'acces a la justice, reconnu a tous les citoyens par la Constitution Francaise et les Declarations Europeennes sur les Droits de l'Homme, avait conduit les responsables du CNRS et de l'ENS a me cataloguer, et me traiter, comme un element antisocial. 2. Bref historique (je tiens un dossier plus complet a votre disposition) J'ai ete recrute par le CNRS en 1973 et nomme Maitre de Recherche (actuel Directeur de Recherche de 2eme classe) en 1979. En juillet 1992, j'ai ete affecte au LIENS (Laboratoire d'Informatique de l'Ecole Normale Superieure). Au debut de la meme annee, de retour d'une mission de deux ans au Japon, je m'etais heurte a une situation anormale: a) ma dotation financiere avait ete supprimee, me privant ainsi des moyens necessaires a l'exercice de mes fonctions; b) ma carriere etait bloquee, a l'acces au grade de Directeur de Recherche de 1ere classe, pour des raisons qui me sont apparues arbitraires. Des recours gracieux de ma part n'ayant pas obtenu satisfaction, j'ai finalement decide de saisir la juridiction administrative. Par des jugements des 29 avril et 4 novembre 1997, la Cour Administrative d'Appel (qui constate l'existence d'une "discrimination illegale") et le Tribunal Administratif de Paris ont estime mes recours fondes et condamne le CNRS. Cependant, a cause de mon action contentieuse, la Direction du Departement des Sciences pour l'Ingenieur du CNRS (lettre de Monsieur J.J. GAGNEPAIN) a fait annuler debut 1993 tous mes programmes d'echanges internationaux au motif que "le CNRS est maintenant en proces avec ce chercheur". Cette voie de fait m'a porte un tort professionnel tres grave. Les deux jugements precites sont intervenus tres tardivement, alors que j'avais du faire face a cinq ans de pressions et de mise sur la touche, pendant lesquels l'administration avait pu impunement durcir de plus en plus sa position. Meme apres ces jugements, la hierarchie du CNRS et de l'ENS au plus haut niveau a poursuivi sa politique de represailles contre mes recours, aboutissant notamment a ma mutation d'office. Mise en cause par mes recours, la hierarchie a charge l'administration de rechercher tout pretexte permettant de me sanctionner. Des dossiers disproportionnes ont ete echauffaudes. Lors d'une mission que je devais effectuer en Allemagne au moment de la greve des personnels SNCF de l'automne 1995, j'ai du changer mon billet de train par un billet d'avion, avec un surcout de 1500 F pour lequel le Bureau des Missions m'a donne son accord. Vu l'urgence de la situation, le Bureau m'a conseille de signer cette depense de mon propre nom (ce qui etait dans mes attributions, vu ma condition de responsable d'equipe et le montant des frais). Cette signature, qui dans des conditions normales aurait ete une affaire de routine, a ete exploitee pour tenter de m'imputer une faute professionnelle et engager une campagne de denigrement personnel qui a abouti a ma mutation d'office sous couvert d'un pretendu "interet de la recherche" en decembre 1997. La procedure a ete entachee de nombreuses irregularites, jusqu'a la deformation de l'avis de l'instance d'evaluation scientifique. Je tiens a votre disposition la correspondance administrative echangee entre les differentes autorites et qui temoigne de leur volonte d'exercer des represailles a mon egard. Suite a ma greve de la faim, et aux reactions qu'elle a suscitees, Mme. le Directeur General du CNRS a retire ma mutation d'office et designe des mediateurs. Mais le directeur du LIENS refuse d'exercer ses fonctions tant que j'y serai present et, avec le soutien du Directeur de l'ENS, s'apprete a m'exclure du laboratoire dans le cadre de la contractualisation prevue pour l'annee en cours. La hierarchie scientifique exige d'avoir gain de cause a tout prix et refuse d'accepter le moindre tort. 3. Conclusion: necessite d'une commission d'enquete parlementaire Nous sommes confrontes a un probleme de fond au sein des institutions scientifiques, les litiges entre la hierarchie et les agents etant devenus nombreux au cours de la derniere decennie. Ces litiges n'impliquent pas des personnels en perte de vitesse sur le plan professionnel: ils touchent en general des chercheurs et techniciens dont le caractere est juge trop independant et qui, pour cette raison et souvent parce que leur activite de recherche concurrence avec succes celle des proteges de la hierarchie, subissent des mises a l'ecart plus ou moins violentes (jusqu'a la destruction physique de laboratoires, e.g. le cas de Mme. et M. PARVEZ a Orsay). La mainmise sur les acquis professionnels de l'interesse fait souvent partie des mobiles de l'abus de pouvoir. Tout se passe comme si le systeme n'etait plus en mesure d'exploiter de facon positive l'energie de ses effectifs humains, a cause d'une hierarchie devenue toute-puissante et inamovible (il y a vingt ans, le retour a la base apres quelques annees etait la regle, mais les actuels "directeurs" et "coordinateurs" restent a vie dans ces fonctions et forment un milieu a part). Cette hierarchie, porteuse d'interets etroits etrangers a celui de la recherche, marginalise les initiatives creatrices et reprime l'independance de la pensee. Sciences et Avenir evoquait recemment (mars 1998) la necessite de faire partie de "clubs" pour obtenir des financements: il convient de preciser que la soumission au systeme est egalement exigee (e.g. mon exclusion de toute collaboration internationale pour avoir saisi la juridiction administrative sur un probleme sans rapport avec ces collaborations). Dans un contexte verrouille, ou la politique est coupee de la base et ou tres peu de voix osent s'exprimer avec franchise (y compris au sein des instances dites "paritaires"), des litiges dont le reglement aurait du etre aise et dont l'existence meme appelle des questions, deviennent des conflits aigus qui perdurent, s'aggravent au fil des annees et poussent leurs victimes a des actions extremes comme seul moyen de se faire entendre. Des cris d'alarme surgissent au sein meme des institutions. Le rapport Ethique et institutions scientifiques du Comite d'Ethique du CNRS (juillet 1997 , accessible sur Internet a l'adresse www.cnrs.fr/ethique/ethsc.pdf) constate des derives inquietantes. Sans doute, ce rapport emanant de la hierarchie elle-meme et dont la teneur ne peut que refleter des compromis, ne va pas jusqu'au bout de la pensee qui l'a inspire. Mais il nous en dit suffisamment pour que de nombreuses questions puissent legitimement etre posees. Les pratiques d'influence, les chasses gardees, l'opacite dans les prises de decisions, la repression contre ceux qui signalent les dysfonctionnements... y sont denoncees. L'un des auteurs du rapport plaide explicitement, dans le Journal du CNRS de mars 1998, pour la "formule americaine de protection des whistleblowers, les lanceurs d'alerte", alors que, quelques lignes plus haut, le meme Journal du CNRS signale (p. 14) a propos du "scandale de l'ARC" que "pendant longtemps, ceux qui ont tente de le denoncer ont ete pourchasses". On ne peut que s'emouvoir de ces constats et declarations, auquels s'ajoute le "cas VIDELIER" (mise au placard d'un chercheur ayant denonce le negationnisme) et qui temoignent d'une deroute institutionnelle devant une situation devenue de plus en plus grave a cause de la passivite des pouvoirs publics. Les reformes de la recherche scientifique et de l'Universite ont ete, depuis longtemps, systematiquement confiees a la hierarchie scientifique elle-meme: cette formule tres contestable porte la responsabilite de l'impasse actuelle. Echappant a tout controle exterieur, la hierarchie a servi ses propres interets et accru successivement ses pouvoirs et privileges. Elle a developpe une administration et une machinerie relationnelle plethoriques, tout en etouffant la voix des chercheurs actifs qui pouvaient tres difficilement arriver jusqu'aux medias et instances politiques de decision. Contre les dissidents, elle brandit la menace de bannissement de la "communaute scientifique". En occultant de graves dysfonctionnements, la hierarchie scientifique a su persuader le monde politique d'un pretendu "bon fonctionement general" de la recherche et faire traduire une "necessite de laisser travailler les scientifiques" par une "carte blanche" donnee aux dirigeants. Dans les rapports, les "problemes de la recherche" sont reduits a des questions budgetaires et d'organigramme, l'independance des chercheurs etant assimilee de facon demagogique a ce qui de fait s'y oppose, a savoir le renforcement des pouvoirs et "autonomie" des directeurs de laboratoire. Cette involution, soutenue par des fonctionnaires ministeriels tout aussi inamovibles, a provoque apres deux decennies une crise generale du systeme qui menace a present l'economie du pays et qui me semble exiger la mise en place d'une commission d'enquete parlementaire} afin de faire le point, de facon independante et devant toute la Nation, sur l'ensemble des problemes des etablissements a vocation scientifique. Michel DEZA