COLLECTIF "ARTICLE 57"

Article 57 de la Loi 84-52 du 26 janvier 1984:

"Les enseignants-chercheurs, les enseignants et les chercheurs jouissent d'une pleine indépendance et d'une entière liberté d'expression dans l'exercice de leurs fonctions d'enseignement et de leurs activités de recherche, sous les réserves que leur imposent, conformément aux traditions universitaires et aux dispositions de la présente loi, les principes de tolérance et d'objectivité"


le 17 juin 1999

LETTRE OUVERTE A MONSIEUR JEAN-PIERRE BOURGUIGNON

A l'occasion de la Consultation Nationale sur la Recherche, un collectif a été formé, ayant pour but de défendre la transparence, la liberté d'expression et l'indépendance de la recherche scientifique. D'extrême urgence, nous nous adressons à vous, mathématicien, Directeur de l'Institut des Hautes Etudes Scientifiques et Président du comité de pilotage de l'actuel débat sur la recherche, pour vous demander d'intervenir sans délai afin que cessent le harcèlement et les interdits professionnels que subit Michel DEZA, mathématicien du Laboratoire d'Informatique de l'Ecole Normale Supérieure et Directeur de Recherche au CNRS, et qui l'ont contraint à poursuivre sa grève de la faim depuis déjà quatorze jours (voir: http://www.dmi.ens.fr/users/deza ). Cette grève de la faim, et les exactions absurdes qui imposent ce conflit à notre collègue, témoignent des dysfonctionnements actuels, de plus en plus graves, des institutions scientifiques.

Plus généralement, nous demandons que soient rétablies dans les institutions scientifiques la liberté d'expression et d'opinion et l'indépendance des activités de recherche en conformité avec la Loi 84-52, ainsi que la transparence. Et, en conséquence:

- l'établissement d'un rapport écrit circonstancié, communiqué à l'occasion de toute évaluation de laboratoires, de personnes ou de programmes de recherche ainsi que lors des concours et appels d'offres; suite à des recours mettant en évidence de graves anomalies dans ces rapports, la Direction du CNRS les a tout simplement supprimés dans nombreux de cas;

- l'accès de tout membre du personnel scientifique à des moyens de travail rendant possible l'exercice de ses fonctions en toute autonomie; nous assistons à la mise en oeuvre d'une politique d'embrigadement des scientifiques qui, de plus en plus, les prive arbitrairement de ces moyens prévus par la loi et par la jurisprudence du Conseil d'Etat et leur enlève l'autonomie de leur démarche scientifique reconnue par l'article 25 de la Loi 82-610 du 15 juillet 1982;

- la communication au public des rapports 95 - M - 013 - 01, 02, 03, 04 et 05 (trois rapports, un rapport de synthèse et une note de synthèse) établis en 1995 par l'Inspection Générale des Finances sous la responsabilité de l'Inspecteur Général Monsieur HIREL et des Inspecteurs Messieurs BRIAT, DEMAROLLE et KEITA; à ce jour, les administrations refusent la communication dudit rapport malgré le jugement du Tribunal Administratif de Paris (resté sans appel) sur l'affaire 96-3150 (GONZALEZ-MESTRES contre CNRS et Ministère de tutelle) intervenu le 17 février 1999 (voir: http://www.multimania.com/virtuel2/TA963150.html ).

L'évolution des institutions scientifiques, depuis deux décennies, menace de plus en plus la liberté d'expression, d'initiative et de création. Le danger que cette dérive autoritaire fait peser sur l'ensemble de la société apparaît clairement à l'examen des dysfonctionnements qui découlent de la "loi du silence" (dénoncée dans le rapport diffusé en 1997 par le COMETS, Comité d'Ethique pour les Sciences, http://www.cnrs.fr/ethique/ethsc.pdf ) ainsi instaurée: affaires de l'ARC, du "sang contaminé", de la "vache folle", de la dioxine...; échecs de grands programmes technologiques (LOCSTAR, rapport public de la Cour des Comptes, 1993; ACRI dans l'informatique; affaire du Bureau de Recherches Géologiques et Minières...)... La presse française a souligné à plusieurs reprises le manque de protection des scientifiques qui tentent de dénoncer les anomalies du système. Il devient extrêmement difficile et parfois impossible, dans l'actuel contexte institutionnel, de remplir les missions de service public de la recherche scientifique.

SIGNATAIRES:

Pierre Andrillon, journaliste
Dominique Ausserré, physicien de la matière condensée
Jeanne Ayache, physicienne nucléaire
Dominique Belougne, assistant-ingénieur
Daniel Benaim, membre d'ATTAC (groupe de travail revenu d'existence)
Noel Bernard, mathématicien
Roger Bertolotti, biologiste moléculaire
May Bloch, assistant-ingénieur
Norbert Bottlaender-Prier, informaticien et traducteur
Mireille Boulard, secrétaire aux universités
Roger Bruère-Dawson, ingénieur de physique nucléire
Pierre Cartier, mathématicien
Michel Chein, professeur en informatique
David Chiesa, musicien
Jean-François Druhen-Charnaux, ingénieur
Jean-Jacques Dugne, physicien des particules
Mathieu Dutour, enseignant en mathématiques
Mohamed Embarki, enseignant-chercheur en phonétique
Bernard Gaveau, mathématicien
Alain Girault, chercheur en informatique
Luis Gonzalez-Mestres, physicien des particules
Emmanuel Grenier, journaliste
Emmanuel Guerre, statisticien
Christian Guilleminot, technicien de recherche
Paul-Marie Guyon, physico-chimiste
Michel Habib, professeur en informatique
Marc-Thierry Jaekel, physicien théoricien
Alain Jejcic, ingénieur de physique nucléaire
Esther Joly, psychanalyste
Vladislav Klaus, Météo-France
Gabrielle Konopczynski, linguiste
Didier Kryn, physicien des particules
Michel Lavaud, physicien des plasmas et informaticien
Bruno Lopez, astronome adjoint
Eulogio Losada-Badía, linguiste
Georges Lutfalla, biologiste moléculaire
Jacques Maillard, physicien des particules
Jean-Marie Maillard, physicien théoricien
Simone Marazzato-Parvez, neurobiologiste
Bernard Mély, biophysicien et sociologue
Roger Milléon, ingénieur de physique nucléaire (retraité)
Marie-Laure Mugnier, enseignant-chercheur en informatique
Joseph Parisi, physicien théoricien
Hasan Parvez, neuropharmacologue
Daniel Petrini, astrophysicien
Josette Peyrard, professeur de gestion
Max Peyrard, professeur de gestion
Maurice Pouzet, mathématicien
Maurice Rabache, biochimiste
François Schächter, biologiste
Irène Seloyan, Météo-France
Arlette Solladié-Cavallo, chimiste
Sylvie Treuillet, enseignant-chercheur en électronique et optique
Isabelle Voltaire, enseignante en mathématiques

Avec le soutien de:

Collectif REPERE, Résistance Pour une Ecole Républicaine
Evelyne Benentendi, responsable bureau d'études bâtiment
Pierre Bougaud, enseignant d'allemand (soutien à Michel Deza)
Roger Favry, enseignant
Ingrid-Hélène Guet, étudiante école de commerce
André Intartaglia, enseignant retraité
Marco Jean-Montcler, praticien hygiéniste
Nicole Lamotte ép. Pernolet, assistante de service social (soutien à M. Deza)
Jean-Pierre Lansac, médécin généraliste
André Lefranc, professeur des sciences de la vie et de la terre
René Pernolet, enseignant en chimie-physique (soutien à Michel Deza)
Yves Petident, artiste - informaticien
Michel Veysset, agent de la fonction publique territoriale

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